Evénement

LAB’BEL 10 ANS – SYLVIE BOULANGER

Pour célébrer son anniversaire, le laboratoire artistique Lab'Bel publie Lab’Bel 10 ans auquel Sylvie Boulanger a contribué.

Pour célébrer son anniversaire, le laboratoire artistique Lab’Bel publie Lab’Bel 10 ans, un ouvrage de 200 pages qui rassemble les contributions de Laëtitia Badaut Haussmann, Gilles Baume, Cécile Béliot, Léa Bismuth, Morgane Blant-Boniou, Sylvie Boulanger, Laurent Bourdereau, Stephan Brüggemann, Henrique Manuel Bento Fialho, Antoine Fiévet, Laurent Fiévet, Béatrice Grenade, Silvia Guerra, David Horvitz, Audrey Illouz, Amélie Lavin, Haroon Mirza, Ines Moreira, Elli-Anna Peristeraki, Angeliki Poulou, François Prodromides, Karin Sander, Michael Staab, Jacques Heinrich Toussaint, Anselmo Tumpić et Séverine Waelchli. 

Voici le début de le contribution de Sylvie Boulanger:

« THANK YOU, BUT I DON’T NEED ANY FURTHER EXPLANATIONS OR TEXT. I HAVE SEEN THE EXHIBITION. » 

Quand tu tapes, vise au-delà de ta cible, plus d’un mètre au-delà de ta cible. Le choc doit se situer au milieu de la trajectoire prévue. Le conseil du maître karaté vaut aussi pour la pratique de l’édition. Quand l’énergie pousse à publier au-delà du sujet, elle atteint la cible avec une puissance décuplée.

Autant le préciser d’emblée, je déteste les catalogues d’exposition en général, en particulier ceux dont l’objectif est la représentation des œuvres en petit, et en deux dimensions, associée à des notices plus ou moins vendeuses. On parle parfois de plaquettes de présentation, j’ai toujours trop bien compris pourquoi. Scories d’une surproduction autant critiquée que pratiquée.  Et, comme le dit Thomas Bayrle « Un pot de bouillie, il cuit encore et encore, jusqu’à déborder, c’était ça la surproduction, j’étais fasciné et critique à la fois de cette surproduction.» 

Thomas Bayrle, in Film de présentation Boîte Collector – Thomas Bayrle, 2015.

Ou bien faudrait-il des catalogues, des listes ordonnées comme ceux des marées ou des ventes aux enchères : des vignettes, de toutes petites vignettes, toutes au même format qui permettent de se croire plutôt dans un dictionnaire, une encyclopédie, une base de données ; qui ne simulent aucune fidélité et nous plonge dans la poétique du listing dont on ne voit pas la fin, qui subliment notre frustration de ne pas être devant l’objet. 

Il peut être intéressant de considérer le développement exponentiel de l’intérêt pour la publication comme un acte refoulé. Un acte artistique qui, refusant les valeurs dominantes, se déplacerait sur une forme d’autant plus puissante qu’il porterait en lui le désir refoulé de renouer avec l’engagement artistique. La politique éditoriale de Lab’Bel est une forme d’acte refoulé, les seuls actes dont on peut être sûrs qu’ils soient sincères et réjouissants. 

La série des publications Metaphoria commence par une mise en garde paradoxale d’un visiteur imaginaire et représentatif de notre méfiance grandissante face aux explications, médiations et autres commentaires. « THANK YOU, BUT I DON’T NEED ANY FURTHER EXPLANATIONS OR TEXT. I HAVE SEEN THE EXHIBITION. »

Comment se taire en effet pour laisser la conversation se faire. Sans doute parce que les éditeur.es de Lab’Bel ont une pratique poétique du commissariat d’exposition, ils ne semblent pas obéir au mot d’ordre académique d’être subjugué.es par l’œuvre. (étym. subjugué : muet, dépassé). Ils savent que l’artiste souhaite entamer les conversations. La politique éditoriale de Lab’Bel entame les conversations comme on entame le fromage. »